L'Été de la rainette
Vignette de Kikie Crêvecœur
L’enfance revisitée. Conjuguée au conditionnel présent.
Et soudain tout serait là. Recréé. Rendu.
À la fois familier et empli de mystère.
L’éternité troublante de nos sept ans.
L’attention portée au monde, aux choses, à la vie, à ce qui s’y révèle, à ce qui se dissimule, traverse chaque instant de ces poèmes en prose de Corinne Hoex. Les signes, les ombres, les murmures mêmes se font discrets. Tout s’offre au conditionnel : ce serait… Ce serait comme revisiter des moments précis de l’enfance, l’âge de la saisie, le temps de ces petits riens considérables, puisqu’ils offrent à chaque instant d’une époque de la vie révolue leur présent, et l’avenir qui dure encore, qui n’en finit pas de prolonger la mémoire secrète bien que chargée de ce qu’on pourrait désigner par le mot d’éternité. La vie évoquée ici est le renouvellement de ce qui a été vécu. Tout le contraire d’une simple nostalgie. Chaque instant est vu comme un récif, et un récitatif, sur lequel la saison, l’été en l’occurrence, jette sa lumière. Au point que quelque chose d’intemporel s’incarne dans le temporel. Le lecteur est emporté par le rythme de la phrase, par ce qui s’offre à lui de familier. Et il s’y reconnaît. L’auteure, elle, bouleverse notre rapport avec le temps : l’attention retrouvée, et la tension de la patience et de l’attente renouvelée. Il aura suffi d’ouvrir les yeux tout autour de soi pour être, enfant, bouleversé par l’expression trouvée, parole poétique qui cherche ici à en témoigner.
Pierre-Yves Soucy, éditeur
Fiche
- Visuel
- Année
- 2016
- Édition
- Éditions Le Cormier
Extrait
Ce serait l’été. Sous la table d’osier. À l’ombre de la nappe. Dans l’herbe où court une araignée brillante et noire comme un œil. L’été sous cette table parmi les écheveaux de soie de ton ouvrage.
Ton premier point de croix. C’est là qu’il faut piquer.