La fenêtre
"Une femme est assise devant un mur blanc. Elle se tait, elle attend. Que le temps passe, que la mort vienne, que le froid s'installe. En elle pourtant grouillent des choses du passé, vivantes, tièdes, terribles parfois. C'est la vie, cette vie dont elle ne veut plus et qu'elle a fuie, une fois pour toutes. Mais où cela se passe-t-il? Quel est donc cet univers où rien ne bouge sinon le souvenir, quelquefois, et le rêve... Que fait -elle là, cette femme sans nom, devant le rectangle gris d'une fenêtre vide? Dehors, pourtant, il y a le soleil, le vent léger, et les cris des enfants... Il suffirait peut-être d'ouvrir la fenêtre."
Publié pour la première fois en 1994, ce deuxième roman de l'auteur, réédité sous le titre "Briser la Fenêtre", a obtenu deux ans plus tard le Prix littéraire du Parlement de la Communauté française de Belgique. Il était introuvable site à la disparition de ses deux premiers éditeurs. Le voici enfin réédité sous son titre original.
Fiche
- Visuel
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- Année
- 2016
- Édition
- M.E.O.
Extrait
Le ciel est gris par la fenêtre. Il n'est pas bleu, nul arbre n'y berce sa palme, aucun oiseau n'y chante doucement. Tiens, voilà un autre poète... Il était en prison je crois, et il rêvait, et il espérait, et il avait en lui la vie qui jaillissait au bout de ses doigts en fil bleu sur le papier. L n'est pas en prison, elle ne rêve plus, elle n'espère rien, et le fil gris qu'elle tisse comme une petite araignée tenace serait plutôt celui de la mort. Elle est d'ailleurs morte déjà, souvent. Tu crois qu'on ne meurt qu'une fois, et qu'on ne revient jamais pour le raconter ? Tu te trompes. Moi, je sais comment on meurt, et que c'est doux. C'est la vie qui fait mal quand elle revient. La mort ne fait pas mal.
Ce qu'elle attend, la petite araignée folle, ce qu'elle guette dans sa toile en spirale, c'est la mort. Déjà, tout est vide, et ça, c'est bien. Mais ce vide reste sonore, hélas : une porte s'ouvre, se ferme, une voix parle dans une langue bizarre, un regard interroge... L ferme les yeux, elle se ferme toute, mais ce n'est pas encore parfait. Le vrai vide, le grand vide sans fond, sans fin, c'est celui-là que j'attends.