Anna Alexis Michel

  • Écrit / Audiovisuel / Spectacle vivant / Multimedia

Hommage au Petit Prince de Saint Exupéry

Quatre-vingts talents pour les quatre-vingts ans du Petit Prince

Livre collectif sous la direction d'Anna Alexis Michel et Sandrine Mehrez Kukurudz

Préface de Francis Dubois, Coordonnateur - Le Cocktail Français au National Arts Club de New York, ancien Ambassadeur des Nations-Unies

Couverture et direction artistique

Sandra Encaoua Berrih

Contributeurs

Anna Alexis Michel, Mona Azzam, Isabelle Bary, Marie-Claire Bauceré Dehaene, Amira Benbekta Rekal, Sylvie Beroud, Emma Blue, Frann Bokertoff, Olivier Bonneton, Pascale Boulineau, Bou Bounoider, Corine Braka, Chantal Cadoret, Nour Cadour, Agnès Castera, Gérard Cavana, Valérie Chèze-Masgrangas, Max Clanet, Tangi Colombel, Marie Blanche Cordou, Olivier Coutier-Delgosha, Luxy Dark, Gaëlle Déchelette, Michael Delaporte, Laurent Desvoux-D'Yrek, Émilie Dhérin, Hélène & Alexander Drummond, Pom Ehentrant, Vincent Engel, Laure Enza, Zeina Fayad, Muriel de Foucaud, Gilles Gaillard, Cathy Galière, Cyrielle Gau, Jean-Michel Guiart, Evelyne Guzy, Christine Hainaut, Carine Hernandez, Sonia Waehla Hotere, Belinda Ibrahim, Florence Issac, Yannick Jan, Jean Jauniaux, Dominique Jezegou, Didier Kimmel, Nathalie Kohl, Tricia Lauzon, Jean-François Leger, Michel Lobé Etamé, Catherine Loup (Wolf), Meziane Mahmoudia, Valy Marval, Alice Masson, Sandrine Mehrez Kukurudz, Marie Meyel, Valérie Mirarchi, Lydia Mirdjanian, Steve Moradel, Don Moukassa, Nabil Naaman, Anne-Sophie Nédélec, Tom Noti, Françoise Péeters, Aude Prieur, Mariem Raïss, Nirina Ralaivao, Marie-Amélie Rigal, Claudia Rizet, Nathalie Sennegon-Nataf, Marynka Tabi, Éric Thériault, Gildas Thomas, Sophie Turco, Pierre-Jacques Villard.

Fiche

Visuel
Année
2023
Édition
Éditions Rencontre des Auteurs Francophones
Co-auteur.trice(s)
Livre collectif sous la direction d'Anna Alexis Michel et Sandrine Mehrez Kukurudz

Extrait

La naissance des églantines

Anna Alexis Michel

(États-Unis)

Il n'y avait rien sur cette planète. Rien qu'un monde dévasté. Celui d'après la grande lumière qui avait tout emporté.

Puis, un jour qui ressemblait à mille autres avant lui, un engin étrange avait fendu les cieux. C'était un petit globe de verre, avec en son centre, triomphante, une rose. Unique, énorme et magnifique.

Le globe s'était posé sur le sol calciné et aride, et la tête de la rose, sous le choc de l'atterrissage, s'était un instant inclinée dans un joli mouvement ondulatoire. La rose s'était ébrouée pour remettre en place ses délicats pétales, tandis que des gouttes de rosée, projetées par son étrange gymnastique, commençaient à perler sur les parois du globe irisé et cristallin.

Autour de l'étrange vaisseau qui venait de toucher terre, il n'y avait que des pierres silencieuses et des ombres inquiètes. Les ombres n'avaient jamais vu de rose. Et les pierres, qui recèlent tous les secrets du monde, se taisaient parce qu'elles savent qu'elles doivent être muettes, sinon on les casse pour voler les trésors qu'elles contiennent. Alors, cherchant à se faire oublier, elles avaient roulé, rondes et lisses, sous les pieds des ombres pour mieux se dissimuler.

  •  Bonjour, dit la rose aux ombres.

Les ombres semblaient un peu ahuries, mais le joli envahisseur n'avait pas l'air méchant. Il y avait sur cette rose quatre épines acérées bien visibles, mais la beauté du spectacle était telle que les ombres en restaient stupéfaites. La rosa remarqua que leurs bouches étaient fines et sans lèvres, et leurs yeux sans paupières. Elles semblaient innocentes. 

Enhardie, la rose avait continué : 

  •  Je cherche un prince. Enfin, pas n'importe quel prince. Attendez que je vous le décrive, avait-elle dit, et de ses pétales, elle en avait mimé la description : il n'est pas très grand. En fait, pour être honnête, il est plutôt petit. Mais il est trop mignon. Ses cheveux sont couleur de soleil et son teint celui de ma rosée. Son habit a la douceur de mes pétales. Son nom, c'est le Petit Prince. 

Les ombres faisaient les yeux ronds. Il fallait que la rose explique davantage. Alors, elle avait continué son récit : 

  •  Il était parti en voyage. Nous nous étions un peu brouillés, rien de grave. Puis, je me suis endormie, pensant qu'il reviendrait. Et à mon réveil, il n'était pas là. J'ai dû dormir longtemps, cent ans peut-être. Car les baobabs ont poussé et si mon prince avait été là, il ne l'aurait pas permis. Il a bien trop peur qu'ils atomisent la planète. Mon prince ne les aime pas trop, et moi non plus d'ailleurs. Ce sont les baobabs qui m'ont réveillée, avec leurs branches qui prenaient toute la place et poussaient mon globe de verre. Je les soupçonne de l'avoir fait exprès. Ils ne se sont même pas excusés. Je leur ai demandé s'ils l'avaient vu, mais pas moyen de leur tirer les vers du nez !

Pensez donc, ces sales baobabs sont bien trop heureux que mon prince ait disparu, parce que lui, il arrachait leurs rejets pour les empêcher de se multiplier, mais, bon, ils n'appréciaient pas...Alors que c'est pour leur bien, pour qu'il y ait assez d'espace pour chacun, ma planète est petite, on ne peut pas accueillir tout le monde. Au fait, vous en voulez, des baobabs ? Vous avez pas mal de place ici, ça ne vous gênerait pas beaucoup. Je peux vous en faire livrer...

Dites, auriez-vous vu un prince récemment ? Disons, ces cent dernières années ?