Michael Matthys au Palais des Beaus-Arts de Charleroi. Repas avec des dieux de tout bord

Michael Matthys : Repas avec des dieux de tout bord L'oeuvre de Michael Matthys est un buffet auquel on prend part avec des dieux méconnus et anthropomorphes. C'est une itinérance presque immobile ; le périple d'un autochtone, étranger dans son propre pays ; un chant aphone dans le bruit de la ville et des usines ; une éponge qui absorbe les faits et gestes automatiques de la machine humaine ; un enregistrement silencieux dans un univers tissé d'automatismes ; un déferlement de graphite, une pluie de matière organique sur la ville ; une circulation incessante à laquelle on prend part, inévitablement... Enquête solitaire : « Moloch ». Au départ, Michael Matthys a eu mission de tisser avec les sujets de la machine industrielle, antédiluvienne. Explorateur sans agent, sans commanditaire ; il écrit et dépeint alors « Moloch », publié par les éditions Frémok en 2003, et plonge dans le gouffre, presque sans fond, des usines sidérurgiques de Cockerill Sambre, en y rencontrant ses acteurs de première main : les ouvriers et intendants de cette machine immensurable. Au coeur des ténèbres, au fond des abysses, il sonde le coeur brutal et immémoré de notre société mécanisée (aujourd'hui informatisée). Sa manière de procéder est simple : muni d'un appareil photographique, il pénètre le lieu, suit son guide, et imprime sur la pellicule chaque pas, chaque mouvement qui l'incitent à s'enfoncer plus profondément dans ce monstre mécanisé, laissant les espaces démesurés et sans pitié se déployer sous son regard ; tout en saisissant la simplicité des échanges humains qui s'y tissent. Plus tard, de retour chez lui, investi alors d'un travail solitaire, il grave et imprime cette rencontre avec les ouvriers et dépeint ces grands espaces, bientôt imaginaires. La lumière, symbole de cette force de travail, physique, en lutte avec les rebuts de la matière, se bat alors avec ces immenses plages de pénombre aussi noires que l'encre, écrasée sous sa presse1. Et les mots échangés réapparaissent alors, sur ce fond gélatineux et opaque, impénétrable. Le déluge d'images, lui-même issus d'une machine rotative, scandant le silence de l'atelier, peuplant le calme local, est ponctué de commentaires anodins, de réflexions saisies à la dérobée, de questions subreptices échangées entre ouvriers : les nouvelles réglementations, la mort d'un des leurs, les conditions de travail.

Fiche

Visuel
Année
2009
Édition
H Art

Extrait

Michael Matthys : Repas avec des dieux de tout bord

L'oeuvre de Michael Matthys est un buffet auquel on prend part avec des dieux méconnus et anthropomorphes. C'est une itinérance presque immobile ; le périple d'un autochtone, étranger dans son propre pays ; un chant aphone dans le bruit de la ville et des usines ; une éponge qui absorbe les faits et gestes automatiques de la machine humaine ; un enregistrement silencieux dans un univers tissé d'automatismes ; un déferlement de graphite, une pluie de matière organique sur la ville ; une circulation incessante à laquelle on prend part, inévitablement...

Enquête solitaire : « Moloch ».

Au départ, Michael Matthys a eu mission de tisser avec les sujets de la machine industrielle, antédiluvienne. Explorateur sans agent, sans commanditaire ; il écrit et dépeint alors « Moloch », publié par les éditions Frémok en 2003, et plonge dans le gouffre, presque sans fond, des usines sidérurgiques de Cockerill Sambre, en y rencontrant ses acteurs de première main : les ouvriers et intendants de cette machine immensurable. Au coeur des ténèbres, au fond des abysses, il sonde le coeur brutal et immémoré de notre société mécanisée (aujourd'hui informatisée).
Sa manière de procéder est simple : muni d'un appareil photographique, il pénètre le lieu, suit son guide, et imprime sur la pellicule chaque pas, chaque mouvement qui l'incitent à s'enfoncer plus profondément dans ce monstre mécanisé, laissant les espaces démesurés et sans pitié se déployer sous son regard ; tout en saisissant la simplicité des échanges humains qui s'y tissent.
Plus tard, de retour chez lui, investi alors d'un travail solitaire, il grave et imprime cette rencontre avec les ouvriers et dépeint ces grands espaces, bientôt imaginaires. La lumière, symbole de cette force de travail, physique, en lutte avec les rebuts de la matière, se bat alors avec ces immenses plages de pénombre aussi noires que l'encre, écrasée sous sa presse1. Et les mots échangés réapparaissent alors, sur ce fond gélatineux et opaque, impénétrable. Le déluge d'images, lui-même issus d'une machine rotative, scandant le silence de l'atelier, peuplant le calme local, est ponctué de commentaires anodins, de réflexions saisies à la dérobée, de questions subreptices échangées entre ouvriers : les nouvelles réglementations, la mort d'un des leurs, les conditions de travail.