Histoires naturelles
Qu'on le sache : l'habitude a du bon. Collectionneur dans l'âme, Benjamin Monti, comme à l'accoutumée, nous revient pour nous proposer son dernier ouvrage où son art du dessin investit un ensemble retrouvé d'anciennes planches de sciences naturelles. On y passe ainsi de la pomme de terre à la renoncule, ou encore de l'oeuf de la grenouille à l'ascaris (ver parasite de l'intestin, faut-il le rappeler).
La suite de ces dessins à l'encre qui viennent occuper, pour s'y déployer, chacune de ces planches, instaure ainsi de multiples relations à même de créer des tissus narratifs producteurs d'histoires (naturelles, doit-on dire, puisqu'il s'agit d'histoires conçues à partir d'objets appartenant au domaine de la nature), mais également biographiques, puisqu'il en va, au fil des pages, d'écritures dessinées dont l'objet est de toute évidence le vivant.
Historiquement, il est vrai que le terme d'histoire naturelle s'est toujours trouvé défini comme enquête et description de tout ce qui est visible dans le monde naturel : animal, végétal, minéral. Cependant, la prouesse graphique de Benjamin Monti ne relève pas seulement d'une simple enquête. Elle est également en quête, en ce qu'elle vise, page à page, un ce à quoi (encore invisible, encore inconnu) le dessin se destine.
Un mouvement donc qui ne part à la recherche d'un temps perdu ou encore retrouvé, mais à celle d'une sorte de temps suspendu, dans les silences et les blancs duquel le dessin qui semblait d'abord ne pas pouvoir y trouver place, s'y faire une place, s'y installer, finit par s'armer et se donner à voir comme des révélations de sens, au même titre que des jeux de narrations produisant des histoires. Chacun le sait : il n'existe pas de manuels d'histoire naturelle sans dessin, sans croquis, sans planche.
Et chacun de même conviendra certainement que le grand art de ce manuel d'Histoires naturelles, signé Benjamin Monti, s'illustre par ses dessins de dessins, ses croquis de croquis, ses planches de planches, qui permettent ainsi, par ce face-à-face, ce dédoublement, par cette rhétorique, de créer le sens d'une nouvelle histoire des histoires naturelles.
Fiche
- Visuel
- Année
- 2018
- Édition
- Marguerite Waknine