La Roue
La recette est simple, vous prenez un Nagra Stéréo à bandes, une paire de micros à rubans un texte et quelques bons amis. Voici pour les ingrédients.
Le but est de constituer une pièce radiophonique au départ du texte, sans avoir recours à la parole et en effectuant que des plans séquences sonores. Ici il y en a trois. Plans séquences signifie pas de montage ni mixage, tout s’enregistre en live, donc avec tout le matériel nécessaire au bruitage sous la main. Du coup la liste de matériel pour réaliser La Roue se rallonge : divers outils métalliques (couteaux, chaînes, pied de biche, masse de chantier…), un sac de cinq kilos d’abats de viande offert par le boucher du coin, un sac de vingt kilos de sciure de bois offert par le menuisier du coin, un énorme bloc de béton de chantier, deux madriers de bois dur, une table, un tambour, des baguettes, des noix, un casse noix, divers branchages et « légumes bruissants » (poireaux, carottes, tomates…) et quelques bières en bouteille de verre pour matérialiser la foule des adeptes et rendre la fête plus folle.
L’enregistrement se déroule sous un kiosque à musique au beau milieu du somptueux Parc Josaphat à 1h00 du matin, pour éviter le trop plein de bruits de circulation avoisinant et rendre la pièce le plus atemporelle possible. Le condamné est bâillonné avec un chiffon pour pouvoir le faire hurler sans éveiller tout le quartier.
Tout va bien dans le meilleur des mondes lorsqu’à 2h15 la police déboule sous forme de deux voitures garnies de six hommes en bleu. Tout ce qui jusqu’ici ressemblait à une amicale séance d’enregistrement nocturne se mue alors en quiproquo quelque peu délicat. Quelqu'un du quartier entendant les bruits, cris et coups avant appelé les flics en leur demander d’aller voir dans le parc car « on y égorgeait quelqu’un ». Dur dur alors de leur expliquer la réalité de la situation lorsqu’autour de soi on a les vingt kilos de viande, les outils barbares, un homme bâillonné et des bières éparpillées au sol. Après une longue discussion avec ces messieurs les agents et une séance d’écoute au casque le zèle lié à leur inquiétante trouvaille se mue en volonté de comprendre « comment on peut en arriver là pour faire de la radio ». Ils nous autorisèrent alors à continuer mais de la manière la plus silencieuse possible pour ne plus perturber le voisinage inquiet. Nous nous sommes alors dirigés vers le tourniquet pour enfants afin d’enregistrer le second des trois volets de cette pièce radiophonique. Merci la police belge.
Fiche
- Année
- 2006