« Ces trois dernières années, je les ai passées à écrire FéminiSpunk aux éditions La Découverte (collection Zones), un livre de force, d’analyse lucide et de puissance à partager sur le potentiel révolutionnaire des filles. Or, pendant ces trois années d’écriture, dans ma vraie vie, j’ai perdu tout ce que je possédais. La débandade politique sur la ZAD où je vivais, la joie de la lutte qui disparaît sous la violence de la lutte, la machine broyante des amours qui tournent mal, la folie qui vient, le corps qui lâche, la mort qui guette, le coma, la douleur, l’aphasie, cette traversée de l’impuissance, l’hôpital pendant trois mois, jusqu’au retour en Belgique, deux ruptures amoureuses simultanées qui se vivent dans mon crâne trépané, ma colère indicible, toute force disparue. La lente et impossible guérison achevée, je reprends l’écriture de FéminiSpunk, où non seulement il n’y a aucune place pour ce que je viens de vivre, mais, plus encore, nécessité de le taire. S’est alors ouverte, comme une faille sous mes pieds, tout ce que j’avais dû mettre de côté et qui me revenait en pleine gueule. En quelques mois, Scalp fut écrit. Un poème pour chaque flash. Avec une telle facilité ! Comme manger une cerise, en sucer le noyau jusqu’à ce qu’il soit parfaitement lisse dans la bouche et puis le cracher avec précision en direction d’une cible silencieuse. Scalp est donc une vue sur les coulisses de l’écriture de FéminiSpunk ; l’endroit où j’ai mis tout ce qui ne pouvait pas s’y dire et qui ne voulait cependant pas se laisser docilement taire. »