Henri Roanne

  • Écrit / Son / Audiovisuel / Multimedia

LE FANTOME DE LA CINEMATEK

Henri RoanneRosenblatt LE FANTOME DE LA CINEMATEK (Projet de roman ; version du 3.2.2016) Fils introverti d'une mère juive envahissante, Gilles Rosenkranz, archiviste en charge des incunables à la Bibliothèque royale de Belgique et cinéphile assidu, pousse accidentellement une porte de service au Musée du cinéma. En la franchissant, il se trouve déambulant sur les ChampsÉlysées. Jean Seberg y vend le New York Herald Tribune à la criée. Un rêve, cette incursion dans « A bout de souffle » ? Le lendemain matin, Gilles trouve pourtant au pied de son lit, un exemplaire du NYHT du 7 mars 1959 ! Fidel Castro vient de prendre le pouvoir à Cuba ! Intrigué, Gilles retourne à la Cinémathèque. Il retrouve le mystérieux checkpoint, point de passage entre le monde présumé réel et celui des ombres animées. Désormais, il le franchira fréquemment pour flâner dans "La reine Christine", « Left handed gun », "Citizen Kane », « Vertigo »... Plongé au coeur des films, il croise sur Sunset boulevard, les stars les plus mythiques de l'histoire du cinéma. Au détour d'une séquence, il rencontre même Jacques Ledoux, le visionnaire qui accumulait les films dans sa baignoire pour les léguer à la postérité. A l'instar des oeuvres qu'il a conservées, Jacques Ledoux a refusé de tomber en poussière dans sa boite. Il a trouvé refuge dans le musée qu'il a créé. Gilles parviendratil, comme le lui suggère Ledoux toujours en quête de nouvelles expérimentations cinématographiques, à infléchir le cours des films dont il connaît le scenario ? Permettratil à Antonio, le malheureux colleur d'affiches du "Voleur de bicyclette", de conserver son emploi, en lui passant le vélo dérobé au "Gamin au vélo"? Pourratil introduire « L'ombre d'un doute » dans l'esprit de Teresa Wright et la soustraire à l'influence maléfique de son oncle Charlie, en lui faisant franchir en sens inverse la porte de la cinémathèque et en l'abritant à Bruxelles ? Le couple improbable qu'il formera avec l'actrice vatil pouvoir respirer hors de l'espace protégé de l'écran et, pire encore, échapper aux reproches de la maman de Gilles? Ainsi, l'exploration de quelques classiques du cinéma infléchira doucement la vie du jeune homme et en brisera la routine. Les émotions qu'ils dégagent, les expériences qu'ils donnent à partager élargiront progressivement sa vision du monde. Elles l'ouvriront aux rencontres qu'il a ignorées ou rejetées auparavant. Sur le bus de la Stib qu'il emprunte tous les jours, il répond enfin au sourire d'une voyageuse inconnue,Tina. Un hic menace rapidement l'idylle qui s'amorce : la jolie jeune femme, sosie d'une actrice célèbre de Holywood, n'aime que les séries télé. Gilles qui a revu récemment « A star is born » se trouve un autre sujet d'inquiétude. Le cinéma ne lui joue-t-il pas un nouveau tour : Tina ne serait-elle pas la réincarnation de Judy Garland ?

Fiche

Année
2016

Extrait

I. Fidel Castro au pouvoir

Et maintenant, qu'est-ce que tu fais ?Tu remontes ou tu descends les Champs?
C'est quoi les Champs ?
Les Champs-Élysées !

Saisi d'une subite rage de dents, je me précipite hors de la salle Ledoux sans ménagement pour les pieds de mes voisins. Je m’engouffre dans la cage d'escalier et, étourdi par la douleur, je pousse par inadvertance une porte de service.  Je butte sur des ustensiles de nettoyage, des seaux, des balais, des détergents.

Au fond du placard sombre, apparaît une lueur éclatante, j'entends les rumeurs d'une ville.

J'avance et je débouche... derrière l'écran. Je suis dans le film ! J'en oublie la molaire qui me taraudait.

Une jeune brunette, cheveux courts a la garçonne, portant un blue-jeans et un maillot clair "NYHT" déambule sur les Champs-Élysées. Jean-Paul Belmondo alias Michel Poicard que j'avais vu discutant avec elle, n'est plus à ses côtés.

New York Herald Tribune... New York Herald Tribune !

Je lui tends un billet de 5 Euros.

C'est quoi ça « Yeuro » ? Je ne prends pas l'argent étranger, Monsieur, ici c'est des francs français.

Je fouille mes poches et je trouve au fond de mon portefeuille un billet de 5 dollars que, tu ne me croiras pas Jules, Jean Seberg accepte de changer.

Écoute, Gilles, c'est merveilleux, me dit mon ami, Jules. Tu as eu le chance de faire un rêve que tout cinéphile rêverait de rêver.

Je lui tends le « New York Herald Tribune ».

Oui ?
Regarde la date !

7 mars 1959

Une photo de Fidel Castro qui, le mois précédent, a pris, le pouvoir à Cuba, occupe une grande partie de la première page.

Et alors ?

Je l'ai acheté hier.

Chez un bouquiniste ?

Non à une vendeuse à la criée sur les Champs-Élysées

Tu étais à Paris ?

Non, à la Cinematek à Bruxelles !

Ils y vendent de vieux journaux maintenant ?

Non, je me suis égaré dans « A bout de souffle » !