JEANNE
Je vais mourir, je vais mourir dans un corps empli d’une infinité de vies possibles. Sous l’écrin de ma peau, dans la fadeur de ma décomposition à venir, il y a cette douleur extrême qui habite mon corps et me remplit de solitude. J’aimerais la disperser au gré des tumultes et des orages. J’aimerais devenir guerrière, cramponnée au salut de mon âme, blessant mes démons par coup de colère et de résistance. J’aimerais ne plus être dans cette solitude, ne plus accepter l’inacceptable et partager ce que personne ne peut accepter. Je suis devenue une étrangère de ma propre espérance de vie, dans un pays habité par les ombres, là où il n’y a ni chaleur, ni havre de paix, où il n’y a que tempête et tourment. Et dans mon dedans, il y a comme une gargouille qui me dévore, cellule après cellule, neurone après neurone, s’accrochant aux synapses comme on s’accroche aux mots, aux derniers mots, et la bouche ne s’ouvrira plus et les yeux ne verront plus et je balancerai mon dernier souffle... mais je sais que dans tout cela, dans tout cela, il y a de l’amour aussi !