...Ils étaient quatre et des quatre, un petit garçon qui devait être le plus jeune me ressemblait terriblement au même âge. Peut-être que tous les petits garçons se ressemblent à cet âge ! Me suis-je dit. Au dos, il n’y avait aucune indication, pas la moindre information. Sur la photo, on voyait une maman assise sur une chaise au milieu d’un parc. Le parc devait être le jardin du Luxembourg car je reconnaissais la statue de Blanche de Castille. Cette maman portait sur les genoux un petit garçon et était entourée de deux petites filles. Seul le garçonnet ne portait pas d’étoile sur la poitrine. La similitude entre les photos était stupéfiante. Grand-père avait-il aimé cette femme ? Qui était-elle ? Où était le père ? Qui avait pris cette photo ? Cette découverte me troubla. J’en fus Tellement troublé que je n’en dormis plus. J’imaginais que grand-père avait eu une double vie. J’imaginais que l’enfant aurait pu être moi. Pourtant, l’enfant, plus vivant que jamais, m’attendait. Chaque nuit, il revenait me hanter : Ecris, c’est ton histoire aussi. Il attendait que je lui prenne la main et retrace le chemin. Quel chemin ? J’imaginais tant de choses que le jour, je dirais même les jours se levaient sans que je n’aie fermé les yeux. J’avais espéré que cette insomnie ne soit que passagère. Au contraire, elle se renouvelait nuit après nuit. J’avais essayé les vins, les infusions, la relaxation, les bains chauds, les huiles essentielles, les somnifères pour ne plus attendre le sommeil et faire taire mes angoisses nocturnes. Piètres vigiles. Je crois que je voulais me convaincre que la ressemblance s’arrêtait à l’âge, que son histoire ne pouvait être liée à la mienne....