SCANDIUM

Ce soir le ciel est clair sur la route de bitume
jaune doré sur gris foncé
je roule en pensant au poème
l’œil attiré par la boule orangée
planant sur l’horizon
ce poème lent à naître, à scander
l’oreille tenue par le violon
qui joue de Bruxelles jusqu’à moi
un concerto de Sibelius.
C’est le scandium qui commence
comme une main sur l’archet
à prendre force de poème.
Pour l’entendre j’ai besoin de silence.
Je suis entrée dans ma petite chambre
aux volets fermés, j’ai allumé
une simple bougie.
Et peu à peu le voici qui émerge
de la terre de mes songes
léger, précieux, couleur d’aluminium
levé par les bras d’un sculpteur,
tel un corps de femme, un Picasso rieur :
des contours mouvants
une masse aux vibrations molles
appelée à l’incandescence.
Le poème surgit de cet amalgame
de glaise, de chair et de lumière ;
le scandium, mon prétexte, en est la fleur sonore

ici, l’espace d’une flamme,
s’élançant de l’opaque
à la lueur évanescente.