Avril 1944, mon père a 20 ans. Il quitte Bruxelles et rejoint un groupe de résistants dans la vallée de la Semois dans les Ardennes. Son surnom: Gandhi. Il y vivra caché dans les bois, en compagnie d'une cinquantaine d'autres hommes. Mon père participa à des action d'espionnage, de sabotage et de combat jusqu'à la libération. C'est du moins ce qu'il disait… Avril 2010, mon père a 86 ans. Je lis un livre qu'il m'a donné: "Maquisards d'Ardenne" de Victor Eloy. Ce livre écrit par un compagnon de maquis, relate avec précision leur condition de vie au quotidien. Je suis à la fois captivé, ému et bouleversé par la lecture de ce livre. Je suis allé voir mon père et lui ai dit combien j'étais fier de lui et de ce qu'il avait fait. Deux jours plus tard, mon père est mort. Mais alors que j'aimerai en savoir plus, que sais-je réellement de cette histoire? Pourquoi a-t-il quitté Bruxelles, à l'âge de vingt ans, pour aller vivre dans les bois dans une région où il ne connaissait personne? Je décide alors de partir pour cette région où moi non plus je ne connais personne. J'ai pour seul guide ce livre qu'il m'a donné. Ce livre où mon père a noté des noms de compagnon de maquis, des croquis de certains lieux. Je commence alors une enquête et retrouve petit à petit des gens qui ont soit connu mon père soit vécu les mêmes évènements que lui. Chaque témoin m'apportant une pièce d'un puzzle qui s'assemble au fil des rencontres. Ce voyage sur les traces de mon père est aussi pour moi un voyage dans le temps où, j'évoque la relation que nous avons eu. Je parlerai aussi de ce qu'il m'a transmis: la lutte et la résistance. J'évoquerai aussi pourquoi je n'ai pas cru ou ne me suis pas intéressé aux histoires qu'il me racontait. J'évoquerai enfin ce qui pour moi était un mystère. Tous les ans mon père retournait revoir la forêt où il avait vécu. Il installait sa caravane à l'orée du bois et restait là plusieurs jours. Je reconstruis petit à petit cette histoire qui commence comme toutes les histoires. Comme celles que je lis à mon fils le soir avant de s'endormir. Cette histoire est aussi la sienne, la mienne, celle de mon père. Elle commence par: "il était une fois." Il était une fois, Gandhi dans les bois.