Histoires d'un idiot de guerre

Le jour de la libération de Rome vu à travers les yeux d'un gamin. Une histoire racontée pendant trente ans, puis ramifiée dans la mémoire et dans l'imagination, dans laquelle le bombardement de San Lorenzo cotoie la légende du coiffeur aux belles mains et où le ratissement du quartier du Quadraro se transforme en parabole des mouches pacifiques et parfaites. Les sortilèges du grand conteur qu'est Ascanio Celestini.

Fiche

Extrait

Mon père était le deuxième de quatre garçons.
Le premier s’appelait Ernesto, après lui est né Gaetano, mais Gaetano est mort-né.
(Comme ça), quand mon père est né, ils l’ont appelé Gaetano en hommage à son frère mort.
Seulement en famille on avait du mal à l’appeler avec le nom du mort, c’est pourquoi on a toujours appelé mon père : Nino.
C’est comme ça que nous l’avons appelé, nous, ses fils.

Je n’ai aucun mal à imaginer mon père gamin. Je l’imagine sur base de ce qu’il m’a raconté pendant trente ans. Je l’imagine aussi au cimetière avec ses parents, rendant visite à son frère mort. J’imagine que ça devait lui faire quelque chose d’amener des fleurs sur sa tombe, de regarder la pierre tombale et de voir inscrit son prénom à lui.

Ça fait quelque chose d’appeler les vivants avec le nom des morts.
Ça fait quelque chose de prononcer le nom d’un mort et d’entendre un vivant te répondre.
Mon père aussi a risqué de mourir quand il était gamin, mais c’était une chose normale à l’époque.