Les ailes de la nuit

Nous sommes sur un grand bateau en pleine mer, ou sur une terrasse romaine surplombant Piazza Navona... Ce qui est sûr c’est que pendant toute l’action la nuit tombe et l’aube ne se lasse pas d’arriver. Ils sont quatre, deux d’entre eux sont liés ou l’ont été. Ils se rencontrent, se quittent, se désirent, se nient et se souviennent … où viennent-ils parler ? A la source du mensonge d’aimer. Aimantés par la lumière du jour naissant ils ne survivront qu’en s’abreuvant de leurs petits silences inespérés. Les personnages : Yolande Durieux : la quarantaine, belle et faussement légère, Mario Conti : la quarantaine et l’accent italien, Armide Polieuscu : 58 ans énigmatique et fascinante, Rumor Polieuscu : son mari, la soixantaine, homme de théâtre. "Les ailes de la nuit" (Éditions Groupe Aven) a été créée le 23 avril 1985 au Théâtre de l'Esprit Frappeur (Bruxelles), mise en scène Bernard De Coster. Avec par ordre d’entrée en scène, Stéphane Auberghen (Yolande Durieux), David Pontremoli (Mario Conti), Marie-Ange Dutheil (Armide Polieuscu) et Jacques Lippe (Rumor Polieuscu). Scénographie et costumes Thierry Bosquet, maquillages Jean-Pierre Finotto.

Fiche

Année
1985

Extrait

Yolande : Savez-vous ce que j´avais convenu avec Mario ? Armide : Non. Yolande : Que ce soir j´aurais changé de prénom, mais rien que pour lui, un prénom nouveau dans sa bouche à lui. Mais vous parliez de cadeau? Armide : J´ai envie d´oublier de vous avoir parlé ce soir, et de vous faire cadeau de cet oubli-là. Un silence, Yolande sort d´une démarche hésitante. Mario entre, une douce fatigue lui noie les yeux et les traits du visage. Mario : Has she gone? Armide : No. She has never been here. Mario : I would like to talk to you. Could you stay for a while please? Armide : That depends on which language. Mario : I beg your pardon? Armide : Yes, that depends an which language you want to talk to me. Mario : Is it important for you? Armide : Bien sûr c´est important. Il y a des langues qui sont faites pour dire ce que d´autres ne diront jamais. Il y a même des langues qui sont faites pour ne rien dire. Mario : Vous savez... Armide : Vous parlez français? Mario : Très mal. C´est à cause de difficultés que j´avais mal parlé pour dire la chose importante. Comment dire... avec Yolande... You know I couldn´t speak about love in English or in French, you must forgive me. Je ne parlé d´aimer que en italien. Armide : N´est-ce pas ce que je vous disais? Il y a des langues qui sont faites pour dire certaines choses et pas d´autres. Mario : Vous connaissez elle? Armide : á peine. Nous nous sommes croisées plusieurs fois, hier nous nous sommes rencontrées, nous avons parlé ensemble, aujourd´hui nous avons compris que hier il ne s´était rien passé, mais ça nous ne l´avons pas dit. Mario : Je l´aime. Armide : En français? Mario rit. Armide : Je me demande si c´est de mieux parler français qui vous fait parler d´amour, ou si c´est de mieux aimer qui fait que la langue dans laquelle vous le dites vous importe moins. Mario : Ah... je peux parler d´amour avec vous... Armide : De votre amour pour elle dites-vous? Mario : Oui, à vous c´est différent. Armide : C´est bien ce que je disais. La langue n´y est pour rien.