Il doit être aux alentours de 22 h. Je marche le long d’un boulevard au centre de Bruxelles, mon téléphone portable à la main. C’est la première fois que je confie mes filles à cette baby-sitter qui n’a pas l’air d’avoir inventé le fil à couper le beurre. Une Mercedes s’arrête au feu rouge. Un homme arrive en courant et brise la vitre de la voiture. La femme derrière le volant crie. Je suis sur le trottoir, à quelques mètres de là. Je vois les bris de verre sur le siège en cuir beige. L’homme s’en va en courant. La conductrice crie toujours. Et moi, je rejoins ma voiture. J’ai peur que ma vitre soit cassée. Mon véhicule est intact. Je m’enferme. Mes mouvements sont précipités, ne pas oublier les phares. J’aperçois une ombre sur le trottoir. J’enfonce la pédale d’accélérateur, l’ombre n’est plus qu’un point à l’horizon. Je roule sur la petite ceinture de Bruxelles. J’entrouvre la fenêtre, inspire profondément, referme aussitôt, car un vent glacé s’engouffre dans l’habitacle. J’aurais dû m’assurer que la femme dans la Mercedes allait bien. Je revois ses mains manucurées et son siège passager couvert d’éclats de verre. Je n’ai rien fait. Rien fait.