Le fragile

Samedi soir, ou plutôt samedi nuit. Il y a L'inquiète qui, dans son fauteuil, boit un peu de vin et attend. Il y a son fils Le fragile qui, dans sa voiture rouge, fend la nuit. Et puis... il y a... le bal d'après, celui des désarticulés ; deux vieilles qui, dans une pièce blanche et infinie, jouent des vies à la courte paille ; des urgentistes sur la route qui nous racontent ; un bras balancé qui regrette le temps d'avant ; et le carrossier sculpteur qui tente de recoller les morceaux et de construire son géant d'acier.  

"Déjà publiée chez nous avec des textes jeunes publics, Valériane De Maerteleire nous a proposé cette pièce sortant de ce cadre. Il a plu à nos lecteurs et nous sommes heureux de pouvoir l'intégrer dans notre catalogue. Il nous parle, de manière fragmentée, du difficile laisser-aller des parents bienveillants qui ne peuvent s'empêcher de s'inquiéter quand leurs enfants commencent leur vie d'adultes, avec les excès que cela peut comporter".

Fiche

Visuel
Année
2019
Édition
Lansman éditeur

Extrait

elle a l’imagination tragique

toujours
elle n’est pas L’inquiète pour rien

une toute petite vision

la voiture qui dérape
et glissade au bois de la Cambre
ou dans le tunnel Louise
ou dans le dernier tournant au bas de la rue
juste avant la maison
glissade
comme quand il était petit avec la luge
mais sans luge

sans neige

et avec du sang partout

elle est assise et toutes ces minutes sans rien faire

elle boit un peu de vin

parce que rien c’est vraiment trop rien et c’est insupportable

elle regarde le tableau sur le mur en face d’elle

la mer, un bateau

c’est con un tableau de bateau

pourtant dès qu’elle l’a vu, ce tableau, elle l’a voulu

elle ne sait pas pourquoi

elle ne sait même pas si elle le trouve beau

c’est une bête mer bleue et un bête voilier blanc

c’était dans une galerie et c’était cher

elle ne sait même pas si elle a fait une affaire

elle s’en fiche