Les petits ruisseaux font les grandes rivières

Publié le  31.07.2015

souvent, le hasard fait que je rentre dans des cimetières. sans doute à chercher des dates qui correspondent, sans doute à chercher l’endroit parfait. qui prendrait tout son sens.

mais nous n’en sommes pas là.

à force de retourner sur ses pas, à force d’être forcée à revenir dans des lieux, dans des cercles d’amis, dans des cercles de familles, dans des routines d’entraînement.

se pose la question du souvenir.

sachant qu’on se trompe souvent, sachant qu’on compose au mieux, sachant qu’un disque, qu’une photographie …

mais tout bouge, tout respire et cette impossibilité de mettre sur papier, alors parler.

je me rends compte qu’alors que je croyais avoir avalé, digéré, je reste machine à ingurgiter, à malaxer, à rejeter au mieux, des hommages, des inflexions de voix, des flexions de poignets.

la liste des personnages comme nuancier.

j’ignorais l’étendue des saveurs, des douceurs, des envahissements successifs.

ne sachant plus, n’ayant plus accès à l’écriture à passer sur papier mais avec ces histoires qui débordent de ma bouche, j’ai posé l’improvisation, l’immédiateté comme principe d’écriture.

« les petits ruisseaux font les grandes rivières » chante jeanne moreau.

comme tout a de l’importance soudainement, comme chaque minute révèle des siècles soudainement, comme chaque rencontre additionne plus qu’elle ne soustrait.

isabelle adjani / acdc / U2 / marianne faithfull / dolly parton / gloria gaynor / sonic youth / pj harvey / julie andrews / natalie dessay / blur / kate bush / suzy delair / the clash / sparks / eagles / patti smith / alt j / lou reed / brigitte fontaine / marlene dietrich / les gilles de binche / harry belafonte / adriano celentano …

ça pourrait être n’importe qui mais c’est seulement nous. tellement serrés.

je vous invite sur mon sofa, vous regardez mon calendrier, vous mangez un chipito, une boule au coca, vous buvez un vermouth, le cendrier est plein, le tapis très usé, mes mains vous serrent, et nous sommes un choeur vers la fin de la journée. un travail.

une journée de travail.

c’était ce moment où le théâtre est un peu sorti de ma vie, où les règles ont passé de bord, gentiment. alors que je pensais qu’un geste d’écriture se doit d’être univoque dans l’emploi d’une main gauche, d’une main droite avec dedans chacune un outil de reproduction.

il ne reste rien.

qu’une chambre à combler.

 

photo : isabelle bats

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