La nuit chez les Inuit canadiens du haut Arctique : une nuit véritable, mais en trompe-l’œil

Pour nombre d’observateurs, la nuit des hautes latitudes se résume schématiquement au phénomène astronomique saisonnier de la nuit arctique et à son alternance spectaculaire avec son contrepoint, le soleil de minuit. Mais qu’en est-il de la nuit vécue au quotidien par les populations installées dans ces régions ? Quels sont les rapports qu’ils établissent entre les cycles « obscurité-lumière » saisonnier et « nuit- jour » circadien ?

On dansait seulement la nuit

Être actif la nuit est un « art de vivre » chez les Inuit, en particulier ceux des hautes latitudes. Leur langue possède d’ailleurs un terme qui désigne spécifiquement « la veille nocturne jusqu’au matin ». Toute activité semble ainsi à même, au gré des saisons, de repousser autant que possible le moment de l’endormissement. Au-delà de leur spécificité rituelle, les nombreuses fêtes – avec leurs jeux, leurs chants et leurs danses – permettent à chacun d’être pleinement un unnuaqsiuti, un « être de la nuit ».

Beyond darkness and sleep

This is a place where night is dark, like everywhere else, and bright, like nowhere else. This is a people for whom sleep belongs to nighttime, but who nonetheless favor nocturnal wakefulness. This is a people for whom almost any activity seems more appealing than sleep, until the arrival of Christianity. This is a culture which, without totally rejecting binary or dualistic schemes, tends to favor the notion of continuity between events, beings and objects: between night and day, dark and light, dreaming and conscious life. This is a people adept at radical pragmatism.