Trentenaire et jeune maman, l’autrice Katia Lanero Zamora a déjà accumulé une belle expérience, deux albums jeunesse, un cinquième roman La Machine qui vient de sortir aux éditions ActuSF et quelques années de conseillère en scénarios de séries à la RTBF. Et elle continue de partager généreusement sa passion en proposant un atelier d’écriture « Balises » pour déployer son imaginaire.
Faisant écho à La langue française en fête 2021, l’auteur Michaël Lambert l’a rencontrée afin d’explorer avec elle son parcours littéraire et son rapport à l’écriture.
Quand elle entreprend ses études, Katia Lanero Zamora choisit les disciplines qui la rapprochent du métier d’écrivain. Après une licence en langues et littératures romanes, elle poursuit son cursus avec un master en métiers du livre. « J’ai découvert le monde de l’édition, ce que c’est de recevoir des manuscrits tous les matins en arrivant au bureau et d’avoir l’intuition qu’un texte peut être publié, se souvient-elle. Tout cela était très, très intéressant et très formateur, mais malgré tout, je n’avais pas trouvé de réponse à ma question : comment écrit-on une histoire ? » C’est ce qui la pousse à s’inscrire à un atelier d’écriture à long terme où elle explore l’art du récit et où elle pose les bases de sa trilogie Chroniques des Hémisphères. « Participer à cet atelier m’a permis d’apprendre plus en mécanique du récit en un an qu’en dix ans d’études, mais en plus, j’ai rencontré d’autres personnes dont l’écriture était aussi la passion. Cela m’a également appris qu’un texte est perfectible grâce aux échanges qu’on avait après chaque lecture, avec bienveillance et pour que cela soit constructif. Enfin, ajoute-t-elle avec malice, cela m’a fait tomber amoureuse de ce que je cherchais sans la trouver seule : la dramaturgie. »
Sur sa lancée, la jeune autrice continue à se former à la création de scénarios et décroche un poste de conseillère en écriture au sein du pôle séries belges de la RTBF. Les histoires au souffle profond et addictif, c’est la marque de fabrique de cette passionnée de la construction de récits. En 2018, alors que ses projets personnels appartiennent au genre de l’imaginaire, elle co-scénarise, avec Caroline Prévinaire et Audrey Bureau, le podcast « Doulange » qui plonge l’auditeur au cœur d’une centrale nucléaire défaillante. De la fiction, c’est vrai, mais si proche de l’actualité du monde réel. Et la singularité de Katia Lanero Zamora se trouve sur cette crête, ce fil en équilibre entre imaginaire et engagement. « Les thèmes que j’aborde, les questions que je soulève, les émotions que je transmets, quand ça percute, je considère que j’ai réussi ce que je voulais faire », estime-t-elle. Son nouveau roman La Machine est la synthèse de cette recherche : à la fois une allégorie de la guerre civile espagnole, transposée dans le pays imaginaire et haut en couleur de Panîm, et une saga familiale, aussi intimiste que passionnante. L’histoire de deux frères que tout sépare dans une société qui se déchire. Un premier tome dans lequel on plonge en espérant vite la suite et qu’on referme en se demandant s’il ne décrit pas les problèmes fondamentaux que connaît le monde contemporain. « Quand on me dit, pour La Machine, qu’on comprend à quel point, dans le conflit, rien n’est manichéen et tout est gris, je me dis que peut-être, pour un bref moment, j’ai fait passer ma vision sur l’importance de l’empathie. »
Si aujourd’hui elle a décidé de relancer un atelier d’écriture, c’est parce qu’elle aime partager sa passion pour les histoires. Avec sa proposition « Balises », elle invite à esquisser la carte de son imaginaire afin de progresser vers ses propres récits. L’étincelle qu’elle a vécue au début de son parcours, elle a à cœur de la transmettre à celles et ceux qui se lancent à leur tour. Et cette aventure, elle en parle avec beaucoup d’enthousiasme : « Ce que j’aime dans les ateliers, c’est le courage des participants. Moi, je suis là avec le panier de trouvailles que j’ai cueillies sur mon chemin depuis 15 ans. Je donne un outil, je propose de l’essayer dans un texte cadré par une proposition, et là, ils sautent dans leur imaginaire, ils foncent tête baissée sur leur cahier. Cela m’impressionne. Ils écrivent d’un souffle. C’est souvent drôle, émouvant, choquant, admirable. J’aime soulever les potentiels de ces pépites, j’aime qu’ils se valorisent les uns les autres. C’est pour ça que je préfère les ateliers “longs” où les participants se revoient d’une session à l’autre, car la cohésion du groupe fait beaucoup. Animer un atelier d’écriture, pour moi, c’est aussi inviter les singularités de chacun à se révéler, et de veiller à ce que ce soit un safe space. » Écouter Katia Lanero Zamora, c’est comme la lire, ça donne envie de connaître la suite. Et – pourquoi pas ? – d’écrire à son tour.