train
c'est arrivé une fois. le matin. je ne l'aimais plus.
alors que rien ne bouge
qu'on en était certains
rien ne peut être cassé
il y a eu ce seul matin là où je me suis réveillée et je ne l'aimais plus
et puis, toutes les actions se sont mises
la journée s'est mise
j'ai pris le train
lu un journal
vu quelques amis
le jour s'est levé complètement et je ne l'aimais plus
je suis allée la chercher à la gare
fin de journée
j'ai attendu dans cette gare
et quand je l'ai vue
en bas des escaliers, à l'heure, à me chercher des yeux
et me sourire
j'ai arrêté de ne plus l'aimer définitivement
et pour longtemps et pour souvent
pour absolument
ce n'est pas un dérapage
ce n'est pas quelque chose qui va et qui vient
c'est une constante
dans toutes les constantes mathématiques, physiques du monde, il y a celle-là
celle-là qui ne s'est plus jamais perdue
qui est restée comme une évidence que quelque part
au delà même des choses qui sont dites
qui sont irréparables
je n'ai plus jamais arrêté de l'aimer
il ne s'est plus jamais mis en moi de ne pas l'aimer
de ne pas être amoureuse
de ne pas vouloir de ça, goûter ça
je n'attendrai pas
ou peut-être un peu
j'attendrai 10 ans
c'est pas longtemps
j'attendrai chaque fois que je descends d'un train, dans un aéroport
de la retrouver dans le hall de la gare
comme cette toute première fois
comme cette fois quand je ne l'aimais plus
ce jour où je ne l'aimais plus
mais se regarder d'une certaine manière
permet aux souffles de se rejoindre sur des longues distances
un regard perce, quelqu'un regarde et c'est pas seulement voir, c'est regarder
ça ne rentre pas dans l'inspection
ça ne rentre pas dans quelque chose qui établit des lignes de valeurs
ou des listes avec les premiers de la liste
les derniers de la liste
savoir si c'est juste de s'endormir
tout le temps
il n'y a pas de dégoût, il n'y a pas d'envie
il n'y a pas de jalousie qui tienne
c'est le jour où je ne l'aimais plus
que j'ai su