Aller retour

Publié le  13.02.2013

Invitation électronique à lire de vive voix, le jeudi 1er février, des extraits de trois textes devant des programmateurs lors d'un festival jeune public à Vallet, au pays du Muscadet. Où ça ? Au coeur du vignoble nantais, en Loire atlantique(44). Préfecture : Nantes, sous-préfectures : Châteaubriant, Ancenis, Saint-Nazaire. La route vers d'anciennes grandes vacances en 2 CV.

Depuis l'adolescence et les décès dans la famille, les séjours se sont espacés. Quinze ans sans humer le varech, les ifs, ouïr le ressac, les rouleaux écumants se fracasser sur les récifs autrement qu'en rêve. Occasion ou jamais d'aller refaire un tour du côté des plages de l'enfance, avec dans le sac de voyage L'HirondelleVoyageursSur un lit de fougères, textes inspirés par l'école primaire à La Baule-les-Pins, le Lycée du Grand Air. En profiter pour prolonger la lecture en reprenant du début la promenade interrompue au bord de l'Atlantique. De la baie de La Baule (Ar Baol : La Dune) à la pointe du Croisic en passant par Le Pouliguen, le bourg de Batz. Traverser la presqu'île par les marais salants jusqu'à Guérande et revenir par la Grande Côte où le roi soleil sans se presser plonge dans la piscine ultra marine entre les blocs de granit mordorés. Parc des Dryades, Avenue de Belle île, de Ploërmel, d'Ouessant, Place des Palmiers. Les plaques font battre le coeur. Boulevard de l'Océan, le Hall des informations - où l'on trouvait l'Espiègle Lili et Bibi Fricotin - a muté en épatante librairie sous-titrée "L'expression en liberté". On pourrait se croire chez Tropismes et en rapporter H-D Thoreau De la marche (1001 nuits), Pierre Senges Environs et mesures (Le promeneur) et la tentation de ne pas rentrer.

Sacré retour dimanche dernier 4 février en infini chapelet de pèlerins à 30 à l'heure par les vallons enneigés de l'Anjou, du Perche, entre Angers, Le Mans, Chartes et Orléans. Le périphérique Ouest autour de Paris la nuit vers Lille est dégagé. Il n'y a qu'à suivre en bonne poule hypnotisée les flèches et les pointillés, avaler les panneaux, les tunnels à l'orbe interminable. Glisser d'une file à l'autre sur quatre bandes avec l'oeil dans les rétros, à gauche, à droite, au milieu, angle mort, en balayage latéral avant-arrière estimant les distances à la lueur des phares. Il n'y a rien à voir sinon le paysage rythmé des murs antibruit, le blanc ou le jaune des lignes au sol, les chiffres et les lettres bleu blanc LILLE A1, jaune, noir, rétrécissement de la chaussée, réduction de 3 à 2 bandes dans 1000, 300, 200 mètres. La lampe du tableau de bord a déclaré forfait, impossible de lire le compteur de vitesse, passage au jugé, senti avec les pieds, 90, 110, 70, 50 dans les courbes, au feeling sans savoir comment ni où l'on va mais y aller, vogue la voiture, sans trop tendre les muscles des bras ni crisper les mains sur le volant de la brave petite Ka, serrée de près par d'énormes camions-dragons étincelants, des 4/4 pirates, des fourgonnettes surexcitées. Ce sont les pieds, les mains qui voient, freinent, embrayent, débrayent, lâchent les gaz sans réfléchir.
Ni raisonnement ni question, obéissance à la signalétique. Conditionnements et connexions nerveuses commandent coordination, regards, actions. La voix
intérieure, consciente, apaise l'émotivité, encourage, calme, régule la respiration, canalise le stress pour ne pas dire la trouille comme un coach indulgent, psalmodie en mantras qu'on va y arriver, franchir les cercles périlleux les uns après les autres. Et il est heureux qu'autour de Paris la neige n'ait pas étendu son blanc tapis, que la A1, autoroute facile, ce soit tout droit, réservoir plein, et qu'une bonne bouteille de vin portugais chambre à Bruxelles.

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