Géraldine Charpentier, scénariste et réalisatrice prometteuse

Publié le  12.02.2021

À 26 ans et à peine sortie de La Cambre, la réalisatrice impressionne déjà par la maturité de ses films : son « Papa Zaza », particulièrement émouvant, est en compétition dans la catégorie courts métrages étudiants du Festival international du film d’animation de Bruxelles.

L'occasion pour le journaliste Olivier Van Vaerenbergh d'aller à sa rencontre afin de faire le point sur son parcours plutôt prometteur. 

dessin d'une fille tenant un ballon de foot
© affiche du film Papa Zaza

Ne vous fiez pas à sa silhouette frêle et à sa voix timide : Géraldine Charpentier a des choses à nous dire, et les moyens de les exprimer. Avec « Papa Zaza », et en moins de huit minutes, elle promet d'ores et déjà de vous arracher quelques larmes : dans ce court métrage programmé à l'actuel Festival Anima (et donc exceptionnellement visible en ligne, pour cause de Covid et d'édition vituelle), la jeune réalisatrice raconte tout en douceur, en aquarelles numériques, et à hauteur d'enfants l'un des pires drames qui peut s'abattre sur eux  la mort d'un père. Une tragédie  la sienne  que la jeune femme a emballé dans un océan de beauté, de pudeur et de bienveillance, et qui en fait un magnifique moment de cinéma et d'animation. Deux ans plus tôt, cette Normande de naissance mais Bruxelloise d'adoption « définitive, j'ai bien l'intention d'y rester », s'était déjà fait remarquer, et déjà, entre autres, à Anima, avec son précédent court métrage, qui n'avait rien à voir si ce n'est son goût de l'intime et des sujets souvent tabous, tels le deuil : « Récit de soi » donnait cette fois la parole à Lou, jeune femme qui ne s'est jamais sentie femme, et abordait ainsi le thème de l'identité de genre en y multipliant les techniques d'animation, du dessin au collage. Deux courts métrages remarquables et remarqués  « Récit de soi » a été programmé dans de nombreux festivals, « Papa Zaza » a été monté une première fois au Festival bruxellois Elles tournent, dédié aux réalisatrices – qui en disent déjà long sur la maturité et le talent très prometteur de la jeune femme, bien partie pour compter, puisqu'il ne s'agit encore et jusqu'ici que de ses travaux d'étudiante ! « Mes études à La Cambre se sont achevées en septembre dernier avec la réalisation de "Papa Zaza", nous a-t-elle expliqué. Depuis, j'additionne les petits contrats, j'ai une commande pour l'émission "Court-Circuit", je réalise un clip, j'écris des documentaires, des projets personnels, et je vais bientôt travailler sur le film d'une amie. On alterne différents types de boulot, de contrat, et on apprend sur le tas. L'animation est un milieu très dynamique, avec tout un panel de travaux et de création possibles. »

dessin d'une jeune fille couchée sur son lit
© visuel du film Papa Zaza

L'animation est un milieu très dynamique, avec tout un panel de travaux et de créations possibles.

La passion de Géraldine pour l'animation lui est venue dès ses 12 ans : « Je jouais à faire des petits films, quand j'ai compris qu'on pouvait faire de l'image par image, et que je pouvais faire des choses encore plus fun avec une ardoise ou de la pâte à modeler ! En plus, mes deux passions se rejoignaient dans l'animation : faire des images et faire du son. Je suis partie étudier un peu à Paris, puis j'ai entendu parler de La Cambre et de son projet pédagogique : donner du temps et de l'autonomie aux étudiants pour qu'ils développent un point de vue d'auteur, un univers singulier. Surtout, les cours d'animation se donnent au sein d'une école d'art, avec des ateliers qui mélangent les pratiques, avec une grande ouverture sur d'autres disciplines. "Récit de soi" est né ainsi, grâce à un cours de philosophie qui m'a fait découvrir Judith Butler (philosophe américaine qui a beaucoup travaillé su la notion de genre et les théories queer, NDLR) et m'a donné envie de travailler là-dessus. » Une démarche tout à fait différente en ce qui concerne « Papa Zaza » :  « Dès que j'ai commencé mes études, je savais que je voulais les finir en réalisant un film sur mon père. C'est un événement qui a évidemment marqué mon enfance, et un deuil qui a été plutôt géré par le silence  comme souvent en Occident. Dès que je suis entrée à La Cambre, j'ai fait la liste de mes souvenirs et je les ai laissés mariner. Il a fallu ensuite trouver la forme, et la bonne manière de mêler du vécu et de la fiction. J'espère y être parvenue. » On lui confirme, tout en attendant, déjà, l'un de ses prochains projets personnels, qui devrait à nouveau mêler l'animation, l'intime et le réel : « Je suis en train de faire un petit montage sonore de ma messagerie vocale, en reprenant des conversations qui forment une sorte de rupture amoureuse, mais ce n'est pas triste ! Il s'agit plutôt de réconciliation. J'ai déjà dessiné les personnages, fait un petit test, j'aime vraiment ce travail sur le son, et cet aspect documentaire qui peut s'adapter à l'intime. » On prend déjà rendez-vous à un prochain Anima ?

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