J'Hesme
j'aime Clotilde Hesme parce que son désir de jouer est palpable, énorme, bouleversant.
j'aime Clotilde Hesme parce que sa capacité à faire entendre Brecht, sa précision et son goût de la rupture subite dans le jeu, sa maitrise de la surprise sont jouissifs.
j'aime Clotilde Hesme parce que sa voix est nette, puis virevoltante, puis tranchante, puis lyrique, puis déglinguée, puis bulldozer, puis oisillon.
j'aime Clotilde Hesme parce que son corps est son outil, glaise, élastique, muscles, chair qui se tend, se détend, se cabre et s'offre.
j'aime Clotilde Hesme parce qu'elle est reine du théâtre-récit, qu'elle passe du dramatique au narratif avec une évidence totale.
j'aime Clotilde Hesme parce que son intelligence du texte est immédiate, généreuse, communicative.
j'aime Clotilde Hesme parce que ses adresses au public suspendent le temps, émerveillent, pétrifient, kidnappent l'attention et s'amusent avec elle.
j'aime Clotilde Hesme parce qu'elle incarne l'indécente injustice des grands acteurs : le jeu habite en elle, irradie scène et salle, donne tout son sens à l'instant théâtral, justifie intégralement que nous partagions du temps et de l'espace.
j'aime Clotilde Hesme parce qu'elle fait de Baal mon contemporain, mon ami, mon frère ; l'appétit et le désir et les désillusions du double brechtien sont les siens, et les nôtres.
j'aime Clotilde Hesme.
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(la photo dans la photo de droite est extraite du dossier de presse de « Baal », mise en scène de François Orsoni, et créditée au nom de Mathias Augustyniak)